Grand Format aujourd’hui sur Laurent Imbert, l’un des tout premiers joueurs de padel sur le territoire français.

Dans tous les sports, il y a des légendes. Et nous au padel, nous avons la nôtre : Fernando Belasteguin, numéro 1 mondial durant 16 années consécutives : RESPECT !

Nous, fans de padel, nous émerveillons devant les prouesses à répétition des stars du padel mondial mais Padel Magazine a décidé, sur ce coup-là, d’être un peu plus français que d’habitude.

C’est pourquoi nous avons choisi de faire un Grand Format sur quelqu’un qui pourrait être, pour de multiples raisons au cours de ces 30 dernières années, un peu notre « légende » à nous, ou même notre Wikipédia du padel !

“Tombé amoureux de ce sport”

Padel Magazine : Bonjour Laurent, tout d’abord comment vas-tu ?

Laurent Imbert : Je suis en très bonne forme après, comme beaucoup d’entre nous, un passage quasi obligé par la case Covid et également cette guerre en Ukraine qui font que ces deux années ont été très difficiles et parfois tragiques pour beaucoup de personnes ! Mais sinon tout va bien.

PM : Peux-tu nous raconter comment et quand tu as commencé le padel ?

LI : Aïe ! Ça va faire un petit peu mal au niveau des dates ! J’ai commencé au début des années 90 à Toulouse un peu par hasard à l’âge de 16 ans, car l’un des tout premiers terrains avait été construit dans un club de tennis, à Blagnac. Après quelques heures de découverte et de pratique, je suis tombé amoureux de ce sport !

PM : Pour les passionnés de ce sport, c’était comment le padel dans ces années-là ?

LI : Le matériel et les terrains étaient à des années-lumière de ce qu’ils sont aujourd’hui : terrain avec parois en parpaings avec de la peinture, raquettes en bois d’une épaisseur de 10 mm, le fameux “pico” (retour de mur de 10 cm) entre le grillage et le mur, tout le terrain était à hauteur de 4 mètres et la plus grande différence lorsque j’ai commencé, c’est que nous pratiquions le retour-volée. C’est l’équipe qui retournait le service qui montait à la volée !

Autant vous dire que l’on ne voyait pas beaucoup de par 3, de par 4 et de sortie par les portes !

C’était un padel avec beaucoup moins de joueurs et de pratiquants, avec des aspects financiers très loin de ce qu’il se passe aujourd’hui, seulement médiatisé dans des journaux locaux et en termes de jeu, beaucoup moins spectaculaire que de nos jours mais il avait aussi ses atouts et son charme.

Voilà a quoi ressemblaient les palas au début des années 1990

PM : Comment faisais-tu pour t’entraîner et jouer avec si peu de joueurs et pas d’entraîneur ?

LI : Nous pratiquions beaucoup d’entraînement dans les diagonales droite et gauche en simple. C’est un entraînement très exigeant et très physique. Il apprend à défendre et à attaquer des deux côtés. Il m’a aussi permis d’être aussi à l’aise pour pouvoir jouer à gauche et à droite et finalement d’être plus complet. C’est un des modes de pratique que je recommande à tous les joueurs et joueuses, c’est très instructif et complémentaire des entraînements plus spécifiques.

Nous arrivions quand même à jouer mais la plupart du temps, nous le passions en Espagne et plus précisément à Barcelone pour des tournois et pendant plusieurs années à Marbella durant la période estivale. Marbella et l’Andalousie étaient “The Place To Be” dans le padel européen et même mondial.

World padel Tour Marbella 2019

PM : Justement, parlons de Marbella en Andalousie qui a depuis toujours une place importante dans le padel en Espagne. Pourquoi et comment t’es-tu rendu là-bas ?

LI : J’ai des amis qui habitent là-bas depuis longtemps (ils possèdent Tennis Brothers, un club de tennis) et qui ont d’ailleurs joué en équipe de France pendant plusieurs années. Lorsque je suis arrivé les premières fois à Marbella, ils m’ont présenté tous les grands joueurs et les propriétaires de club. Du coup, j’aidais dans les clubs et en contrepartie, j’avais accès aux installations. Cela m’a permis de m’entraîner avec les meilleurs joueurs du monde pendant plusieurs années.

Pour tout vous dire, ils étaient surtout très sympas de bien vouloir jouer avec moi … mais j’avais quand même mon petit niveau pour pouvoir m’amuser avec eux !

“J’ai joué avec les plus grands”

PM : Quels sont les meilleurs joueurs avec lesquels tu as joué ?

LI : J’ai joué avec les plus grands : Hernan Auguste, Juan Martin Diaz, Willy Lahoz, Alberto Piñon, Pablo Semprun, Sebastian Nerone pour ne citer qu’eux et notamment Roby Gattiker et Alejandro Lasaigues qui étaient les superstars dans les années 1990 à 2000.

La liste est très longue et j’en oublie beaucoup (j’espère qu’ils me pardonneront s’ils lisent l’article ).

Fernando Belasteguin, je l’ai croisé de multiples fois lorsqu’il est arrivé d’Argentine et j’ai joué contre lui lors de ses débuts en Espagne (on ne parlera pas des résultats mais que de plaisir !)

L’une de mes belles rencontres a été aussi Gaby Reca, en 1996 si je me souviens bien. Un top joueur, un gars sympa avec une très belle carrière, qui transmet beaucoup aux autres et avec qui j’ai gardé contact.

J’ai même revu d’anciens internationaux argentins et espagnols à travers le Championnat du Monde Senior à Las Vegas comme Oscar Not, Carlos Almazan ou Cecilia Bacigalupo … souvenirs, souvenirs !

PM : Justement depuis toutes ces années, il doit y avoir des souvenirs, des anecdotes, non ? Et certains plus importants que d’autres ?

LI : Alors là, il va falloir écrire un livre ou une trilogie ! Mais oui toutes ces années ont été remplies de souvenirs, d’anecdotes et de rencontres toutes différentes et vécues à des âges différents. Pour les anecdotes croustillantes, je préfère rester discret …

Quand vous arrivez au 1er championnat du Monde de Padel à Madrid, que vous avez tout juste 19 ans et que vous serrez la main du roi d’Espagne Juan Carlos, que vous entendez les hymnes, que vous jouez pour votre pays, et même si cela était un sport encore confidentiel, ce sont des moments et des émotions que seul le sport peut vous procurer et qui restent inoubliables.

Pour ceux qui connaissent le tennis d’il y a quelques années, j’ai joué au Paraguay, à Asuncion, contre Victor Pecci (ancien finaliste à Roland-Garros face à Bjorn Borg) dans son club. Superstar dans son pays, télévision nationale en direct, des tribunes remplies, c’était à la fois super excitant mais aussi très terrifiant pour un gamin de 20 ans. Ceux qui ont eu la chance de jouer des matchs de padel en Amérique du Sud connaissent la chaude ambiance dans les tribunes …

Il y aurait tellement de choses à raconter mais on ne va pas faire ma biographie, ce n’est pas sûr que cela passionne tout le monde !

Un drapeau français au milieux des drapeaux argentins et espagnols

PM : Et sur le plan sportif, tes meilleurs souvenirs ou résultats ?

LI : Il y a bien sûr le 1er championnat du Monde de l’Histoire du padel en 1992 à Madrid et j’y étais !

Le championnat du Monde à Toulouse, dans ma ville, en 2000.

Il y eu la création du My Padel Tour avec mon ami Alexis Salles et du coup, j’en profite pour lui passer un petit bonjour parce que lui aussi, il fait partie de mes très belles rencontres grâce au padel.

Laurent Imbert Didier Deschamps et Alexis Salles

Si l’on parle de résultat à proprement parler, mon plus grand souvenir, c’était la 3ème place aux championnats du monde en 2012 avec l’équipe féminine. C’est la première et seule fois où une équipe de France a obtenu une médaille de bronze à un championnat du monde par équipe.

Quand vous regardez le padel sur Wikipédia et que vous voyez ce drapeau français au milieu de tous ces drapeaux argentins et espagnols pour la quasi-totalité, c’est émouvant et cela provoque de la fierté de se dire qu’on l’a fait !

Du coup, je n’ai qu’une chose à dire : BRAVO LES FILLES !

PM : Raconte-nous ta dernière expérience en septembre 2021 ?

LI : Tout d’abord, il faut remercier la Fédération Française de Tennis et toutes les personnes qui ont travaillé pour que ce voyage se réalise et ce dans de très bonnes conditions.

Nous sommes partis aux championnats du Monde en septembre 2021 au Mexique avec les juniors filles et garçons. Je vais d’ailleurs profiter de cette interview pour les remercier toutes et tous pour leur investissement sportif et personnel durant ces dix jours. Cela a été pour moi de belles rencontres personnelles et cela m’a aussi permis d’avoir une vision différente du padel.

Que ce soit dans les entraînements, la préparation des matchs, l’écoute, la curiosité et le regard émerveillé de ces jeunes de pouvoir participer à cette compétition, c’était hyper rafraichissant.

J’espère qu’ils diront la même chose de moi …

Laurent Imbert à droite avec léquipe de France féminine junior au championnat du monde 2021 Mexique

“Soutenir et accompagner, chacun à notre manière, l’institution FFT”

PM : Cette réponse me permet de faire le lien avec la question suivante. Tu te doutais bien que nous parlerions à un moment donné, dans cette interview, de la Fédération Française de Tennis. Depuis plusieurs années, les gens parlent beaucoup en bien et en mal. Quel est ton avis ?

LI : Mon avis est très clair et ne souffre d’aucune ambiguïté. Rien n’est parfait en ce monde mais depuis que la FFT a repris le padel, quoique les gens disent, il a avancé bien plus vite en quelques années que depuis son apparition en France.

Je ne revendique absolument rien mais cela fait 30 ans que je vois l’évolution du padel dans le monde et en France. Il me semble que je fais partie des personnes qui connaissent « un petit peu » ce sport et donc cela me fait sourire quand je vois, quand je lis ou que j’entends régulièrement des personnes qui critiquent ou qui parlent mal de la FFT.

Il y a aussi ceux qui ont beaucoup critiqué cette institution qu’est la Fédération Française de Tennis et qui pourtant aujourd’hui sont bien contents de travailler avec ou de profiter de sa puissance financière et de ses compétences pour faire des Championnats du Monde ou d’Europe dans de belles conditions ou d’autres évènements liés au padel.

Pour en finir avec ta question, beaucoup de choses sont mises en place : les aides aux clubs, le TFP (Titre à finalité professionnelle), la création des Championnats de France (junior et seniors), le FFT Padel Tour, les stages et les compétitions internationales, le développement chez les jeunes, …

On ne va pas citer et développer toutes les actions mises en place mais cela n’existait pas avant donc, pour moi, il faut soutenir et accompagner, chacun à notre manière, l’institution FFT.

PM : 30 années de padel remplies d’aventures humaines et sportives, d’anecdotes ! Tu as imaginé un jour écrire un livre sur ta vie dans le padel ?

LI : Cela m’a déjà « légèrement » traversé l’esprit surtout en plaisantant avec des amis et certains joueurs qui me connaissent bien mais je ne suis ni écrivain ni journaliste alors… Et puis je n’en ai pas encore fini avec le padel, il va devoir me supporter encore quelques années. Mais pourquoi pas ?

PM : Tu as tout connu ou presque dans le padel, tu as fait des rencontres incroyables durant toutes ces années… Qu’est-ce que l’on peut te souhaiter de plus dans les années à venir ?

LI : Je vais essayer d’être plus présent dans le padel dans les années à venir car mon emploi du temps professionnel va me le permettre. J’ai aujourd’hui des envies. Des envies de rendre à ce sport ce qu’il m’a donné et procuré comme plaisir et comme passion.

J’ai envie de transmettre tout ce que j’ai découvert, ce que j’ai appris et ce que j’ai vécu à travers ce sport pendant toutes ces années. C’est cette passion et cet amour du sport que je voudrais que les gens ressentent, car c’est tellement incroyable…

PM : De quelles façons tu t’imagines le faire ?

LI : J’ai pas mal d’envies mais il faut aussi qu’elles soient partagées : cela pourrait être en tant que consultant auprès des différents diffuseurs tels que beIN Sports ou Canal+, à travers les sélections de jeunes auprès de la FFT et également en tant que coach.

Alexis Salles et Laurent Imbert en commentateurs sur le My Padel Tour

J’y réfléchis beaucoup en ce moment et ce qui est sûr c’est qu’il y a énormément d’envie de ma part.

Et pourquoi pas une rubrique « Grand Format » une fois par mois dans Padel Mag ?!

PM : Laurent, merci beaucoup pour cet excellent moment passé ensemble pour Padel Magazine. Un dernier mot avant de se quitter ?

LI : C’est toujours un plaisir de partager et de parler de padel entre passionnés ! Et comme disait un humoriste français : pourvu que ça dure !

Franck Binisti

Franck Binisti découvre le padel au Club des Pyramides en 2009 en région parisienne. Depuis, le padel fait partie de sa vie. Vous le voyez souvent faire le tour de France en allant couvrir les grands événements de padel français.