Médecin généraliste expert en matière de sport, Pierre-Olivier Ferrand nous éclaire aujourd’hui sur les pathologies spécifiques au padel, sujet qu’il a étudié dans sa thèse.

Les pathologies traumatiques du joueur de padel ont pu être rassemblées en sous-groupes selon la localisation des blessures : tête et cou, tronc, membres supérieurs, membres inférieurs et enfin les blessures à la localisation indéterminée.

L’analyse des données d’un questionnaire détaillé fait ressortir de nombreuses blessures imprécises comme des plaies, des hématomes, des brûlures cutanées ou encore des tendinopathies. Cependant, l’étude a permis une analyse de blessures plus précises et plutôt inattendues.

673 blessures à la loupe

L’étude nous a permis de mettre en évidence 55 pathologies traumatiques différentes pour un total de 673 blessures prises en compte :

  • 9 pathologies localisées à la tête et au cou
  • 5 pathologies localisées au tronc
  • 13 pathologies localisées aux membres supérieurs
  • 23 pathologies localisées aux membres inférieurs
  • 5 pathologies à la localisation indéterminée

Les tableaux ci-dessous regroupent donc l’ensemble des pathologies traumatiques recensées par le questionnaire, regroupées selon la partie du corps atteinte. Lorsque c’est possible, le codage CIM-10 (classification internationale des maladies, 10e révision) a été associé à la pathologie. Enfin, chaque blessure est associée à la ou aux structures qui l’a engendrée (Tableau 3, 4, 5, 6 et 7).


Pierre-Olivier Ferrand, médecin généraliste formé dans les pathologies du sport et la médecine manuelle, nous détaille LES PATHOLOGIES TRAUMATIQUES DU JOUEUR DE PADEL dans le cadre de sa thèse que vous pouvez retrouver en intégralité ICI.


1.      Pathologies du membre inférieur

Dénomination de la blessureCIM-10VitresGrillesFilet et poteauxBallesRaquetteSurface du terrainAutre joueur
Inflammation de l’articulation coxo-fémorale ✔︎      
Déchirure des muscles adducteurs de la cuisseS76.2✔︎
Élongation des muscles ischio-jambiers S76.3✔︎
Contracture des muscles de la cuisseM62.4✔︎
Entorse du genouS83.4, S83.5✔︎✔︎✔︎✔︎✔︎
Rupture partielle du ligament croisé postérieur S83.5✔︎
Lésion méniscale du genouS83.2     ✔︎ 
Tendinopathie rotulienneS86.2✔︎
Périostite tibiale✔︎
Contusion tibialeS80.1✔︎
Déchirure traumatique du triceps suralS86-1✔︎✔︎
Contracture du muscle soléaireM62.4✔︎
Tendinopathie du tendon d’AchilleS86.0     ✔︎ 
Rupture du tendon d’AchilleS86.0✔︎
Entorse de la cheville avec arrachement ligamentaireS93.2   ✔︎   
Entorse de la chevilleS93.4✔︎  ✔︎ ✔︎ 
Syndrome du carrefour postérieur       ✔︎ 
Rupture de l’aponévrose plantaireS96.8     ✔︎ 
Aponévrosite plantaire S96.8     ✔︎ 
Entorse d’une articulation du pied S93.6     ✔︎✔︎
Ténosynovite d’un tendon fléchisseur du piedS96.0✔︎      
Fracture d’un orteil du piedS92.5      ✔︎
Entorse et foulure d’un orteil du piedS93.5✔︎      
Tableau 3 : Les pathologies des membres inférieurs

Le membre inférieur est la localisation où a été reportée la plus grande diversité de blessures. L’ensemble des articulations est concerné, de la hanche jusqu’aux articulations du médio-pied même si l’articulation coxo-fémorale reste très peu concernée par les pathologies avec une simple inflammation décrite. De leurs côtés, les muscles sous-pelviens et le triceps sural sont concernés par des pathologies classiques telles que des déchirures ou contractures musculaires simples.

L’articulation du genou présente, elle, des mécanismes traumatologiques singuliers. En plus de lésions méniscales liées à la surface du terrain, on relève des entorses du genou avec l’ensemble des structures du terrain, sauf la balle et la raquette de padel. On note également une rupture partielle du ligament croisé postérieur du genou en lien avec un traumatisme contre le filet et ses poteaux.

Des entorses suite à des chocs

Enfin, le pied est l’emplacement de blessures multiples et variées. En effet, l’étude nous permet de mettre en évidence de nombreuses pathologies tendineuses et ligamentaires. Nous pouvons souligner l’existence de tendinopathies d’Achille et d’aponévrosites plantaires évoluant jusqu’à la rupture de ces structures. Les entorses de cheville, avec arrachement ligamentaire parfois, ont pu être causées par les vitres, la surface du terrain ou encore la balle.

Dans le cadre des pathologies du membre inférieur, on remarque qu’elles sont principalement causées par la surface du terrain. Cependant, les vitres et l’autre joueur sont également pourvoyeurs de pathologies. Le filet et les poteaux sont peu traumatogènes pour ces parties du corps mais restent dangereux, en témoignent les entorses du genou et la rupture partielle du ligament croisé postérieur relevées.

2.      Pathologies du membre supérieur

Dénomination de la blessureCIM-10VitresGrillesFilet et poteauxBallesRaquetteSurface du terrainAutre joueur
Plaie ouverte digitale S61.1✔︎✔︎
Contusion digitaleS60.0✔︎
Entorse et foulure digitaleS63.6✔︎✔︎✔︎
Fracture digitaleS62.6✔︎
Contusion du poignet S60.2✔︎✔︎
Entorse et foulure du poignetS63.5✔︎✔︎✔︎
Tendinopathie du poignetM77.8✔︎
Tendinopathie de l’avant-brasM77.8✔︎
ÉpicondyliteM77.1✔︎✔︎✔︎
Luxation du coudeS53.1✔︎
Fracture du coudeS52  ✔︎    
Fracture de la tête radialeS52.1✔︎
Entorse acromio-claviculaireS43.5✔︎ 
Tableau 4: Les pathologies des membres supérieurs

Le membre supérieur est également l’emplacement de nombreuses pathologies traumatiques.

On retrouve quelques blessures classiques telles que des tendinopathies du poignet, du coude ou encore de l’avant-bras. Cependant, il existe de nombreuses pathologies bien plus inhabituelles dans les sports de raquette. Les structures délimitant le terrain sont ainsi l’origine de contusions, d’entorses des doigts et du poignet, pouvant même aller jusqu’aux fractures.

La surface du terrain est moins impliquée que pour le membre inférieur, remplacée par les structures sur lesquelles le joueur peut prendre appui ou venir entrer en collision avec le haut du corps. Les vitres sont probablement à l’origine d’entorses acromio-claviculaires par contact direct entre l’épaule et la vitre. Les grilles sont pourvoyeuses de contusions du poignet et des doigts mais également de plaies digitales. Le filet et les poteaux sont responsables de luxations et de fractures du coude, essentiellement de manière indirecte en causant la chute du joueur de padel. Enfin, la balle n’est pas la source de pathologie, mais la raquette l’est au travers de tendinopathies mais également par des traumatismes directs engendrant entorses et contusions.

3.      Pathologies de la tête et du cou

Dénomination de la blessureCIM-10VitresGrillesFilet et poteauxBallesRaquetteSurface du terrainAutre joueur
Traumatisme cervicalS13.4✔︎✔︎✔︎
Traumatisme cranio-facialS00✔︎✔︎✔︎✔︎✔︎✔︎
Lésion traumatique de l’œil et de l’orbite S05✔︎✔︎✔︎
Hémorragie rétinienneH35.6✔︎      
Lésion traumatique superficielle du nezS00.3✔︎
Hématome maxillaire✔︎
Fracture dentaire ✔︎      
Lésion traumatique de la lèvre et de la cavité buccaleS00.5✔︎✔︎
Névralgie cervico-brachialeM79.2✔︎      
Tableau 5 : Les pathologies de la tête et du cou

Les pathologies de la tête et du cou sont moins diversifiées que les pathologies des membres inférieurs et supérieurs. Cependant, certaines restent singulières et pour le moins inhabituelles pour un sport de raquette.

On relève de nombreux traumatismes cervicaux et cranio-faciaux. Bien que peu précis dans le mécanisme lésionnel, ils soulignent les risques représentés à ce niveau par l’ensemble des structures environnant le joueur de padel.

Attention aux vitres et aux raquettes

Parmi les composants de la face, les traumatismes constatés sont plus précis. On note des lésions traumatiques de l’œil et de l’orbite allant jusqu’à l’hémorragie rétinienne. À l’étage inférieur de la face, la région buccale n’est pas épargnée avec des lésions traumatiques des lèvres et de la cavité buccale, des hématomes maxillaires et même une fracture dentaire.

On remarque que les vitres, les raquettes et les balles sont les structures ayant le rôle le plus prononcé dans l’apparition de ces pathologies.

4.      Pathologies du tronc

Dénomination de la blessureCIM-10VitresGrillesFilet et poteauxBallesRaquetteSurface du terrainAutre joueur
Contracture musculaire dorsaleM62.4✔︎
Fracture de côteS22.3✔︎      
Lombalgie basseM54.5✔︎
Traumatisme testiculaireS37✔︎
Hématome du muscle glutéalS70.1✔︎
Tableau 6 : Les pathologies du tronc

Le tronc est la partie du corps où ont été recensées le moins de pathologies traumatiques. On identifie seulement cinq pathologies différentes. Des lombalgies et des hématomes glutéaux sont apparus en lien avec la surface du terrain, des contractures musculaires dorsales avec les vitres.

On relève des fractures de côte avec les vitres et des traumatismes testiculaires en lien avec la balle de padel.

5.      Pathologies à localisation indéterminée

Dénomination de la blessureCIM-10VitresGrillesFilet et poteauxBallesRaquetteSurface du terrainAutre joueur
Plaies✔︎✔︎✔︎✔︎
Hématomes✔︎✔︎✔︎✔︎✔︎✔︎
Brûlures cutanées superficielles✔︎✔︎✔︎✔︎✔︎✔︎
Tendinopathie✔︎✔︎
Fracture✔︎✔︎
Tableau 7 : Les pathologies à localisation indéterminée

Le questionnaire a fait ressortir des pathologies de localisation imprécise et de gravité indéterminable par le biais de ce questionnaire. On relève donc des plaies, des hématomes et des brulures cutanées superficielles, causés par la majorité des structures du terrain de padel.

Des tendinopathies auraient été occasionnées par les grilles et la surface du terrain, avec cependant un mécanisme lésionnel qui paraît peu concordant.

Enfin, quelques fractures ont été provoquées par la raquette et les joueurs de padel environnants.

Bien que ces pathologies soient le plus souvent bénignes, leur fréquence souligne la proximité immédiate du joueur de padel avec son environnement ainsi que le nombre de traumatismes que peuvent subir ces sportifs.

6.      Répartition des pathologies traumatiques

Les réponses au questionnaire récoltées ont permis de recenser 673 blessures. Ce nombre comptabilise l’ensemble des pathologies exprimées dans les questionnaires, certaines personnes ayant exprimé des pathologies multiples.

Le tableau ci-dessous résume ces données et permet l’analyse du nombre de blessures en rapport avec chaque élément du terrain (Tableau 8)

Ainsi, la surface du terrain de padel est l’élément avec lequel le plus de joueurs ont subi une pathologie traumatique : 197 blessures soit 29,27% des pathologies. Elle est également l’élément de l’environnement le plus traumatogène chez les hommes (30,4% des blessures masculines), tandis que l’autre joueur est la catégorie la moins pourvoyeuse de blessures (3,6%).

Du côté féminin, l’analyse du questionnaire ne met en évidence aucune blessure avec le filet et les poteaux, alors que c’est la raquette de padel qui a entraîné le plus d’incidents (28,9%).

Nous avons réalisé une analyse comparative entre les groupes femmes et hommes à l’aide du test de Chi2.

Cette analyse permet de mettre en évidence une différence statistiquement significative entre le nombre d’hommes et de femmes ayant présenté une blessure avec le filet et les poteaux (p=0,0005). Il semblerait donc que cette partie du terrain soit plus propice aux traumatismes chez les hommes plutôt que chez les femmes.

Il existe également une différence statistique (p=0,018) dans la catégorie raquette qui nous dirige vers des blessures plus fréquentes chez les femmes que chez les hommes.

Les analyses effectuées avec les autres structures ne retrouvent pas de différence significative. Ces résultats nous orienteraient donc vers un nombre de sportifs blessés équivalent entre les hommes et les femmes.

Total de blessuresBlessures chez les femmesBlessures chez les hommes 
Structure n (%) n (%)n (%)P-value
Vitres86 (12,77)21 (12,14)65 (13)0,77
Grilles 63 (9,36)13 (7,51)50 (10)0,33
Filet et poteaux37 (5,5)0 (-)37 (7,4)<0,0005
Balle114 (16,94)37 (21,39)77 (15,4)0,07
Raquette151 (22,44)50 (28,9)101 (20,2)0,018
Surface du terrain 197 (29,27)45 (26,01)152 (30,4)0,29
Autre joueur25 (3,71)7 (4,05)18 (3,6)0,79
Total toutes structures673173500   
Tableau 8 : Nombre des pathologies traumatiques selon la structure

Aussi impressionnantes soient-elles, ces données ne veulent certainement pas dire que le padel est un sport où l’on se blesse tout le temps. Bien d’autres sports sont sources de traumatismes, parfois plus graves. L’important est de connaître les risques et d’avoir une préparation physique adaptée pour les prévenir du mieux possible. Et l’essentiel est que la balance entre les nombreux bienfaits d’un sport et ses quelques désagréments penche dans le bon sens.

Pierre-Olivier Ferrand

Mordu de tennis depuis son plus jeune âge, Pierre-Olivier se découvre une passion pour le padel en 2018. Médecin généraliste formé dans les pathologies du sport et la médecine manuelle, il jongle entre raquettes et stéthoscope pour son plus grand plaisir.