Ksenia Sharifova n’est pas une joueuse très connue du grand public et pourtant, on la retrouve de plus en plus dans les tableaux finaux de Premier Padel. Cette joueuse a, par ailleurs, une particularité : elle est la seule joueuse russe présente sur le circuit.

Découverte l’année dernière par le grand public, la désormais coéquipière de Lucia Martinez est passée à notre micro après son huitième de finale perdu contre Gemma Triay et Claudia Fernandez. Elle nous raconte son histoire.

Sa nouvelle vie en tant que joueuse de padel

Avant, j’étais une joueuse de tennis et j’ai arrêté. Maintenant que je suis une joueuse de padel, je suis vraiment reconnaissante d’avoir dans cette vie.

La façon dont Premier Padel organise les tournois est vraiment bien. C’est magnifique, comme on peut le voir sur le court ici, il y a énormément de monde qui est là, à regarder les matchs, l’organisation est bien. On prend beaucoup de plaisir à jouer ce genre de tournois.

Bordeaux pourrait facilement être un P1. La façon dont il est organisé est vraiment top. On apprécie beaucoup ce lieu.

La seule joueuse russe sur le circuit

Être la seule joueuse russe du circuit est un sentiment très fort. Je sais qu’il y a énormément de monde en Russie qui me regarde, qui me connait. Ils m’appellent souvent, ils me questionnent sur mes expériences. Je parle énormément avec les managers d’équipes en Russie.

J’essaye de développer le padel en Russie donc j’ai vraiment l’impression que c’est un travail d’être la première de mon pays et j’espère qu’un jour, nous serons plus de joueurs russes sur le circuit.

Au final, je me sens un peu spéciale parce qu’il y a tellement d’Espagnols, d’Argentins, d’Italiens, de Français et moi je suis la seule. C’est pour ça que je me sens spéciale et que je considère que c’est un travail parce que j’ai la sensation que je dois aider mon pays à développer le padel.

Bordeaux P2 Ksenia Sharifova

Le padel en Russie

Le padel existe en Russie depuis des années et il y a énormément de nouveaux clubs, avec beaucoup de courts. La population apprécie énormément le padel. Je pense toutefois qu’il y a encore un manque d’entraînement.

Il y a quand même pas mal de coachs qui donnent des cours, beaucoup d’entre-eux vont en Espagne pour apprendre comment enseigner aux gens en Russie.

Ça se développe vraiment rapidement. Beaucoup de gens jouent, il y a énormément de courts qui sont rapidement complets. Il y a beaucoup de monde qui joue à Moscou, Saint-Pétersbourg et dans le nord de la Russie.

Il y a un super club qui s’est monté, qui se trouve au milieu d’un centre commercial. C’est vraiment génial car il y a beaucoup de monde qui est là, qui fait du shopping et puis, ils entendent le padel donc ils viennent voir. Alors ils s’inscrivent, ils viennent essayer. C’est une super manière de faire découvrir et une bonne méthode de marketing.

Le manque de joueurs russes à l’international

Le sport est encore jeune dans le pays. Beaucoup d’anciens professionnels de tennis n’arrivent pas encore à comprendre comment ils peuvent gagner de l’argent avec le padel. C’est difficile de pouvoir en vivre en Russie et il faudrait qu’ils déménagent vers l’Espagne.

Peu de joueurs sont prêts à laisser tout derrière eux et juste partir pour s’entraîner en Espagne. Il faudrait qu’ils reprennent tout de zéro, qu’ils apprennent les bases et la technique.

Alors oui, il y a quelques coachs en Russie, qui enseignent le padel aux gens mais ils ont encore besoin de temps. Il y a une équipe sympa qui s’est montée, avec d’anciens joueurs de tennis. Le problème, c’est qu’ils jouent encore au tennis sur la piste.

Je les suis, je regarde leurs matchs, je vois leurs entraînements et ils s’améliorent très rapidement. Je pense que nous pouvons créer une équipe vraiment bien, avec beaucoup de gros smasheurs.

Sa rencontre avec le padel

C’est une histoire très sympa, à vrai dire. Je travaillais en tant que réceptionniste dans mon club de tennis. Parfois, il m’arrivait de jouer au tennis pour m’amuser. Il y avait un coach, Marco Lucas, et il m’a vu jouer au tennis et il m’a dit, “oh, tu sais jouer au tennis” et je lui ai répondu que oui, que j’étais une ancienne joueuse professionnelle de tennis.

Il m’a proposé de jouer au padel et je lui ai répondu que non. J’avais déjà joué au padel auparavant et je ne comprenais pas comment tourner, comment défendre la vitre. C’était trop compliqué pour moi, ça me rendait totalement folle. Il m’a dit : “s’il te plaît, laisse moi t’entraîner pendant un mois et je t’apprendrai comment jouer“. Il m’a dit qu’avec mon passé dans le tennis, mon physique, je pouvais apprendre très vite et gagner plus d’argent avec le padel qu’avec mon travail de réceptionniste.

Ses débuts dans la compétition

Je lui ai dit qu’il se moquait de moi… mais après deux-trois entraînements, il m’a tout montré et j’étais fière de moi car j’arrivais à défendre. Au bout d’un mois, j’ai fait mon premier tournoi national à Valence. J’ai ressenti, une nouvelle fois, cette adrénaline, ce rush de jouer dans un tournoi, quand tu es en compétition.

Je lui ai dit que c’était ce que je voulais, que ça me manquait énormément. À partir de ce moment-là, je me suis mise à m’entraîner de plus en plus. J’ai quitté mon job, mon coach m’a aidé avec les sponsors pour que je puisse me payer les entraînements et les voyages.

Au début, c’était compliqué car je ne pouvais pas entrer dans les tournois, je n’avais pas de points. J’ai eu de la chance car la Fédération de Valence m’a permise d’avoir des wildcards pour le World Padel Tour. À partir de ce moment-là, j’ai pu remporter mes premiers matchs et gagner mes premiers points.

J’ai fait les preprevias pendant des mois, je n’arrivais pas à passer en previas. Puis j’ai réussi à y entrer et j’y suis restée pendant un long moment. Ça a été un long parcours, l’année dernière j’étais encore en qualifications. Cette année, j’ai de la chance de jouer avec Lucia Martinez et je peux être dans le Top 16 mondial des paires.

Lucia Martinez Ksenia Shafirova Bordeaux P2

Amsterdam, la révélation

J’ai fait une interview, il y a deux mois et la personne m’a demandé mon meilleur moment, celui où j’ai ressenti le plus d’émotions et je lui ai parlé de ce moment à Amsterdam. Avant de jouer ce match, nous avions eu des rencontres très compliquées en qualifications, avec des matchs en trois sets.

Nous arrivions dans le tableau face aux jumelles Alayeto et on s’est dit qu’il fallait qu’on profite de ce moment. Mais pendant le premier set, on a senti qu’on pouvait gagner. Parfois, vous entrez sur le terrain en vous disant que, qu’importe ce que vous allez faire, ça va marcher. On a eu ce sentiment et on s’est dit : “battons-nous“.

Quand nous avons gagné, en trois sets, c’était fou. C’était un sentiment tellement incroyable. Lorsque nous sommes rentrées à l’hôtel, nous nous sommes allongées en nous répétant : “qu’est-ce qu’on vient juste de faire ?“. On venait de sortir le meilleur match de notre vie.

Marta [Borrero] est une joueuse de padel depuis qu’elle est toute jeune et elle n’arrêtait pas de répéter : “je n’arrive pas à croire qu’on ait battu les jumelles“. C’est comme si moi, j’avais battu Maria Sharapova ou Serena Williams. Pour Marta, c’était un moment incroyable de sa vie.

Les nombreux voyages, dans le monde entier

Le fait d’avoir été une joueuse de tennis auparavant me fait me dire que ce calendrier n’est pas un problème pour moi. Auparavant, je jouais des tournois partout dans le monde, loin de chez moi. C’est dur parfois financièrement, surtout en Amérique du Sud où les billets sont très chers. Mais je trouve que les prize-money sur le Premier Padel sont bien, ce qui nous permet de payer nos tickets. Les sponsors nous aident aussi beaucoup.

Je ne trouve pas que cela soit dur de voyager mais je pense que c’est compliqué quand les joueuses ne s’entendent pas parce que tu dois penser tellement de temps avec la même personne. En Amérique du Sud, il y a eu des moments où certaines équipes étaient fatiguées d’être toujours ensemble.

Après l’Amérique du Sud, certaines équipes sont devenues plus fortes, plus soudées… et d’autres ont décidé de se séparer, même de coach parfois.

Si vous souhaitez voir l’interview en entier, c’est ici :

Gwenaelle Souyri

C’est son frère qui un jour lui a dit de l’accompagner sur une piste de padel, depuis, Gwenaëlle n’a plus jamais quitté le court. Sauf lorsqu’il s’agit d’aller regarder la retransmission de Padel Magazine, du World Padel Tour… ou du Premier Padel… ou des Championnats de France. En bref, elle est fan de ce sport.