Dix ans plus tôt, il rêvait de fonder son propre complexe dans la banlieue lyonnaise. Finalement, c’est bel et bien à Llançà, en Catalogne, que Sébastien Ducros a trouvé son eldorado sportif et humain. Le Berjallien retrace son parcours et nous ouvre les portes de sa structure, le Club Garbí.
À l’instar des autres stations balnéaires de la Costa Brava, Llançà se fait plus discrète lorsque vient l’hiver. Et pourtant, sous le doux soleil de l’Alt Empordà, le frimas semble déjà bien loin. Niché à une vingtaine de kilomètres de la frontière, ce modeste village de 5 000 habitants se situe à la convergence de la nature, de la mer et des montagnes. Un décor pittoresque dans lequel Sébastien a trouvé son point d’ancrage. Entre le bleu du ciel et celui de la Méditerranée, cet entrepreneur partage avec enthousiasme son amour pour le padel. Rencontre.

La Catalogne, terre d’opportunités
« J’ai découvert le padel à Llançà en 2014-2015. Après avoir fait ma première partie, j’étais fatigué, mais j’avais déjà envie de rejouer. Une vraie “piqûre” d’addict ! Quand je suis rentré en France, Padel Central venait d’ouvrir à Lyon et je jouais régulièrement là-bas (jusqu’à sa fermeture en 2017, ndlr). Je me suis rapidement interrogé sur le développement du padel en France, nous n’étions alors qu’aux prémices. Sébastien Cornet venait de monter Esprit Padel, et à ce moment-là, j’étais en pourparlers avec le Tennis-Club de Bourgoin-Jallieu. Mon but était de monter ma société et de nouer un partenariat avec le club pour développer ce sport. Malheureusement, le mariage entre le privé et le public s’est avéré compliqué. Je suis allé au bout de mon projet mais le loyer demandé était trop conséquent pour mettre en place la structure, alors j’ai préféré arrêter. J’étais démotivé, je voulais vraiment faire quelque chose en France ! Les années passaient et cela devenait de plus en plus difficile. Au final, le bon moment est arrivé ici. J’ai sympathisé avec Franc Geli, le responsable sportif de Garbí. On a imaginé un jour une réflexion commune autour du club, soit pour l’agrandir, soit pour le transférer sur un autre terrain. »
L’heure du renouveau après le Covid
« Le Club Garbí existait déjà lorsque je suis arrivé, sauf qu’il n’était pas sur le même site. Il se situait près du port et était composé de deux pistes de padel, d’un terrain de tennis et d’une piscine, le tout dans un cadre plutôt sympathique. Les premières discussions sérieuses avec Franc ont débuté en 2019. L’idée, c’était d’attendre une occasion pour trouver un nouveau lieu. Le coronavirus a un temps gelé nos plans, mais quelques mois plus tard, nous avons remporté un appel d’offres de la mairie pour un terrain communal. En Espagne, on appelle ça une “concession” : une période de 18 ans pendant laquelle nous pouvons jouir du terrain. En août 2022, nous avons donc déménagé et ouvert un nouveau complexe de quatre pistes outdoor. On est vraiment 100% padel. »
Une ferveur qui ne cesse de progresser
« Aujourd’hui, je suis l’actionnaire majoritaire avec Franc. Il gère le côté sportif tandis que moi, je m’occupe de la partie organisationnelle, du développement des stages et du sponsoring. La partie restauration et boutique est assurée par Enric Baturone (photo), notre salarié, qui est très important dans le fonctionnement de notre structure. Il réside au village et connaît l’ensemble des joueuses et des joueurs. Depuis le déménagement, on constate un fort engouement : nous sommes passés de 70 à 180 socios, et nous comptons désormais trois équipes masculines et féminines inscrites en ligue catalane. Être socio d’un club en Espagne permet de bénéficier de tarifs avantageux en échange d’une cotisation mensuelle. On est une structure hybride entre l’aspect business et social. Pour ce qui est de la pratique, nous proposons toute l’année des cours dispensés par des professeurs diplômés. Certaines personnes viennent nous aider pendant la période estivale. Nous avons également un partenariat avec le collège local, ce qui permet aux professeurs de sport d’amener les enfants sur les pistes pour leur faire découvrir ce sport. »

S’installer à Llançà plutôt qu’ailleurs, « un choix du cœur »
« J’ai 50 ans, et cela va bientôt faire 50 années que je viens en vacances à Llançà. J’ai mes attaches, c’est un choix du cœur. Un choix d’autant plus symbolique puisque c’est dans ce village que j’ai découvert le padel. Je n’avais pas du tout prévu de faire quelque chose ici, et puis les circonstances m’ont fait saisir cette opportunité que je ne regrette pas. À force de revenir tous les étés et de rencontrer du monde, j’ai commencé à réfléchir. Je voulais participer concrètement et activement au développement de ce club familial. »

Un événement inoubliable avec Alix Collombon, numéro 1 tricolore
« Alix Collombon nous a fait le plaisir et l’honneur d’inaugurer le club, à la mi-août 2022 ! J’ai connu Alix quand je jouais à Rillieux-la-Pape et qu’elle débutait. Je l’avais un peu aidée à l’entame de sa carrière, lorsqu’elle voulait s’installer à Barcelone et voir ce qu’elle pouvait faire dans le monde du padel. Je lui avais passé un coup de fil et elle m’avait dit : “Écoute, tu as de la chance parce qu’en ce moment, je suis à Barcelone.” Malgré la météo peu favorable ce jour-là, nous avons pu la recevoir et organiser une exhibition. Il y avait beaucoup de femmes qui étaient présentes, elles ont apprécié de pouvoir échanger avec Alix. C’était très sympa. Deux heures plus tard, on a bu un verre ensemble et elle m’a dit qu’elle avait beaucoup ressenti ce côté social et intime. »
La tactique ibérique face à l’esthétique française
« En Espagne, le jeu a tendance à être plus lent, plus posé. La première chose que l’on apprend ici, c’est de remettre la balle et d’attendre le bon moment pour conclure. En France, on essaye de finir le point plus vite. On cherche avant tout à faire le par 3, le par 4 ou le très bon geste. Les Espagnols, contrairement aux Français, jouent au padel depuis des années sans forcément passer par le tennis, et cela se répercute sur le niveau de jeu. Quand des Français viennent jouer contre des Espagnols, ils pensent avoir une plus jolie technique. Mais la science du jeu de leurs rivaux est telle qu’au bout du compte, ce sont souvent eux qui perdent le match. Elle est là, la grosse différence tactique. C’est ce qui leur permet de faire moins de fautes et d’être, tout simplement, meilleurs que nous. Après, le niveau de jeu est aussi impacté par les personnes qui jouent. C’est un sport qui est vraiment beaucoup plus pratiqué par les femmes qu’en France (34,9 % d’Espagnoles contre 13,2 % de Françaises selon les derniers chiffres, ndlr). »

Rivaliser avec l’Espagne, utopie ou vrai défi ?
« Tout le développement du padel est lié à la Fédération française de tennis. Il y a quand même des moyens qui sont mis en place, notamment pour les clubs de tennis municipaux, afin d’intégrer des terrains de padel dans leurs complexes. J’aurais donc tendance à répondre “pourquoi pas” à cette question. Maintenant, il va falloir du temps. Je pense que la France est sur la bonne voie : les infrastructures deviennent importantes, la qualité de l’enseignement s’améliore et les enfants s’y intéressent. La distance est amenée à se réduire, mais il y a toujours deux mondes d’écart. L’Espagne et l’Argentine sont les deux références et la France fait partie des pays émergents. »
Des projets ambitieux pour le futur
« Notre objectif est de nous pérenniser dans le temps. Pour qu’un petit club comme le nôtre puisse être viable, nous ne pouvons pas nous contenter que des terrains. C’est la combinaison d’un ensemble, à savoir l’activité padel, le sponsoring et la partie bar-restauration qui nous fait vivre. Concernant les prochaines dates importantes, nous avons deux événements à venir : un tournoi homologué qui aura lieu à Pâques, ainsi que notre tournoi anniversaire, qui se déroulera début août. L’année dernière, on a réuni près de 240 joueurs de Llançà et des villages aux alentours. On propose également des stages sur les mois d’avril, mai, juin, septembre et octobre. Différentes formules adaptées à tous les niveaux sont disponibles sur Racket Trip. Enfin, on veut construire une terrasse extérieure pour le bar, vraisemblablement en 2026. Mon souhait pour l’avenir ? Continuer de bien se structurer et de voir les gens s’amuser. Et surtout, garder la convivialité qui fait l’essence de notre club ! »

C’est par le biais de son père qu’Auxence a découvert le padel, un soir de juin 2016. Aujourd’hui, il suit avec passion le circuit international et taquine la pala dans son club formateur, le Toulouse Padel Club. Vous pouvez également le retrouver sur La Feuille de Match et LesViolets.com, deux médias spécialisés sur le Toulouse Football Club.