Dans le padel professionnel, la notion d’équipe est aussi cruciale que le talent individuel. Pourtant, sur le circuit, les séparations de paires s’enchaînent à un rythme effréné. Même les duos les plus emblématiques n’échappent pas à cette instabilité. Pourquoi est-il si difficile pour les joueurs de haut niveau de trouver un partenaire durable ? Et quelles sont les conséquences de cette instabilité chronique ?

L’illusion du coéquipier parfait : entre exigences techniques et tensions humaines

La séparation entre Alejandro Galán et Juan Lebrón illustre parfaitement cette difficulté. Longtemps considérée comme la paire la plus solide du circuit, leur collaboration a fini par voler en éclats en 2024. Les styles de jeu étaient compatibles, pas les caractères. Et si les résultats ont longtemps masqué les tensions, la ficelle a fini par casser. Cela prouve que la complémentarité dans le jeu ne suffit pas à garantir la longévité d’un binôme.

C'est glacial entre Lebrón et Galán

Oui, l’aspect relationnel, souvent éludé dans les analyses sportives, joue un rôle fondamental. Pourtant, les frictions personnelles, les différences de tempérament ou de gestion d’émotions peuvent rapidement transformer une alliance victorieuse ou prometteuse en véritable « fardeau » pour les deux joueurs. Et pour leur entraîneur, qui est souvent le premier à payer les incompatibilités diverses.

Changer pour mieux… stagner ? Quand l’instabilité freine la progression

Le début de saison 2025 a été marqué par une véritable valse des partenaires sur le circuit professionnel. En quelques semaines seulement, plusieurs paires fraîchement formés ont mis fin à leur collaboration de façon prématurée. On pense à Juan Tello et Tino Libaak, ou encore Javi Garrido et Martin Di Nenno. L’Argentin, numéro 6 mondial, formera d’ailleurs une nouvelle paire avec… Tello, lors du P2 de Bruxelles, espérant trouver une nouvelle dynamique.

Juan Tello : un retour en puissance

Depuis qu’il a décidé de se séparer de Franco Stupaczuk en juin 2024 pour s’associer à Juan Lebrón dans l’espoir de conquérir la première place mondiale, Martín Di Nenno ne retrouve plus cette stabilité. Depuis il tente des associations…

Il se retrouve aujourd’hui avec Juan Tello qui, lui, formait pourtant une association prometteuse avec le jeune crack argentin Tino Libaak, mais a décidé de l’abandonner en rejoignant Di Nenno dans sa quête de renaissance.

Le cas de Tello est particulièrement délicat et rend les choses encore plus complexes. Alors qu’il affirmait avoir « retrouvé le sourire » avec Valentino Libaak, et même « ne pas avoir retrouvé un tel niveau depuis Chingotto », le voilà qui met fin à cette association pour rejoindre Martín Di Nenno, 8e joueur mondial.

Dans une interview, il revient sur ce choix, tiraillé entre la satisfaction d’une bonne entente et le besoin de tenter quelque chose de nouveau (encore…). Il reconnaît cette forme de faiblesse qui consiste à croire que l’herbe pourrait être plus verte ailleurs, tout en admettant à quel point le padel est un sport difficile à décrypter.

La dimension relationnelle entre partenaires, le mental, les points au classement, les accords avec les sponsors, les enjeux financiers… autant de paramètres qui s’entrelacent, se percutent parfois, et dépendent aussi du caractère propre à chaque joueur.

Autant dire que le padel professionnel est tout sauf un long fleuve tranquille.

La patience n’est décidément pas la qualité première chez certains champions ou cadors en devenir… Ces réajustements constants traduisent une fébrilité dans la recherche de « l’alchimie parfaite » et soulèvent une vraie question : comment créer des automatismes et adopter une stratégie commune si les partenaires changent tous les mois ? C’est un vrai leurre que de rechercher la performance immédiate, car le padel de haut niveau exige une connaissance affinée des déplacements et des intentions de l’autre. Ce n’est l’ancien, Sanyo qui dira le contraire, lui qui regrette justement “que tout aille plus vite et qu’on ne laisse plus le temps à la paire de se trouver”. Et cette alchimie ne peut se faire sur un tournoi ou sur quelques mois d’entraînements. Tout comme le padel est un sport de patience dans l’échange, cette patience est tout aussi essentielle pour construire une paire solide et pérenne.

À l’inverse, les paires stables, celles qui acceptent de traverser les périodes creuses ensemble, finissent parfois par en tirer les fruits. La fidélité est un levier stratégique : en connaissant parfaitement les forces et faiblesses de son partenaire, on gagne en efficacité, en lecture de jeu, et surtout en constance. Dans un circuit aussi dense que le Premier Padel, cette régularité est un avantage de taille, sur le plan du jeu et dans la course au classement. Qui dit stabilité dit compétitivité ? Justement pas toujours.