Jean-Michel Pequery est bien connu du monde du padel. Oui, c’est un très bon joueur de padel, mais il est aussi et surtout préparateur mental. L’ancien 180e joueur mondial au tennis,  est devenu par la force des choses un incontournable du padel français en travaillant notamment avec Johan Bergeron , Léa Godallier, Jérémy  Scatena et Max Moreau. Il revient pour nous sur son travail.

Comment es-tu devenu préparateur mental ?

On puise ses compétences dans son histoire personnelle. La mienne ne déroge pas à la règle. Et elle a forgé mon travail : celui de préparateur mental. J’ai été longtemps entraîné par la FFT pour le tennis. Mais il y a une blessure importante, une opération qui s’est bien déroulée… Mais il fallait revenir et j’avais 21 ans.

Je voyais que certaines personnes réussissaient autour de moi, et ce n’était pas mon cas. Ils ont compris des choses par eux-mêmes. Et c’est là où il y a eu un déclic. Certains joueurs que je côtoie jouaient comme moi et même pour certains moins bien… Et pourtant, ils réussissaient mieux que moi et obtenaient de meilleurs résultats.

Paradoxal non ?

Il ne faut pas se mentir à soi-même et en même temps il faut être constructif. Il y a un équilibre à trouver. Et pour gagner du temps, il vaut mieux se faire aider. La technique ne règle pas tout, surtout au plus haut niveau où ils ont tous une technique parfaite. Le mental fait la différence au plus niveau.

Quel était ton problème au tennis ?

J’avais des problèmes de comportement. Dans les matchs importants, il m’arrivait de perdre mes moyens. Et puis j’ai eu la chance de tomber sur un préparateur mental qui m’a fait un bien énorme.

Je me suis rendu compte à quel  point cette préparation était si importante.

On peut travailler tous les coups du tennis ou du padel, mais on ne se rend pas compte qu’un bonne préparation  mentale peut avoir une effet bénéfique sur l’ensemble de ses coups.

Pourtant, cette préparation mentale semble absente ou presque du monde sportif ?

C’est certain que nous partons en France de très loin. On prend petit à petit conscience de l’apport d’un préparateur physique pour un sportif amateur ou professionnel.

Mais petit à petit, par les résultats et la demande, les choses se font.

Je fais ce métier depuis 10  ans. Je coache des sportifs, des personnes plus âgées, tous types de profils.

On parle du sport ou du padel, mais la préparation mentale concerne tous les secteurs d’activités. Il y a des fois où il y a des moins, c’est comme ça. C’est la vie. Cette préparation mentale vous permettra certainement de limiter la casse lorsque vous êtes dans un jour sans et de gagner en efficacité dans votre travail.

Le padel, un sport à part ?

Je suis d’accord avec toi. Et je dirais même que c’est peut-être l’un des sports les plus compliqués mentalement car le padel est un sport qui se joue à deux. Il y a une proximité énorme entre ces deux joueurs. D’ailleurs, il y a une proximité entre les quatre joueurs qui fait qu’on ne peut pas négliger le côté mental dans une partie. Il peut prendre des proportions bien plus importantes que dans d’autres domaines.

Du coup, comment travailler avec ces joueurs ?

Il n’y a pas une seule méthode qui fonctionne pour tout le monde, ce serait trop beau.

J’apprends aux joueurs à mieux se comprendre, à s’analyser et à chercher avec eux ce qui leur permet de mieux jouer : “Quand tu joues bien, tu penses à quoi ?”

On construit un état émotionnel qui amène à une performance.

Quand les sportifs parlent de leur performance, ils parlent souvent de leur émotion. Mais ça veut dire quoi mentalement ? Il faut emmener les joueurs vers une zone où ils arrivent à être performants au bon moment.

On  essaie de construire ce mode d’emploi ensemble et d’éviter les absences  dans certains matchs, même si c’est impossible d’éviter d’être dans un jour où l’on ne sent rien. C’est humain.

Parfois, certains joueurs français font une montagne de ces joueurs espagnols. Et du coup, ils ont finalement déjà perdu dans la tête. Mon travail ici est de les préparer mentalement et de leur permettre de donner le maximum d’eux-mêmes malgré les joueurs qui sont en face.

Et surtout se comporter avec confiance contre des joueurs soi-disant mieux classés.

Nos Français pourraient-ils obtenir de meilleurs résultats en Espagne ?

Je ne sais pas. Mais ce qui est certain, c’est que l’aventure est loin d’être facile pour eux. Ils arrivent en effet dans un pays où ils vont jouer des joueurs qui jouent au padel depuis plus d’une décennie. Mais en même temps, il m’arrive souvent d’entendre les joueurs dire : “J’aurais pu faire quelque-chose contre eux“.

C’est à la fois très positif et en même temps très frustrant. Car quand c’est répétitif, c’est qu’il y a alors deux possibilités : soit les joueurs sont en réalité en-dessous et alors ils manquent de recul. Soit ils ont un niveau compétitif, mais il y a un autre problème…

C’est vrai que l’Espagne est la nation du padel mondial. Forcément pour un jeune pays comme le nôtre, c’est beau de jouer sur le circuit professionnel. Mais nos joueurs français, en tout cas pour certains, ne partent pas de zéro. Bien au contraire. L’apport du tennis peut aider énormément et on le voit clairement dans le top français.

On surestime le niveau espagnol ?

On a raison d’être lucide, ça aide à avancer. Et le niveau espagnol est évidemment très relevé.

Mais parfois on se fait une montagne des adversaires. Et finalement on va perdre pour d’autres raisons.

C’est terrible pour un joueur de se dire qu’on aurait en réalité pu mieux faire, mais qu’on a perdu parce que justement on n’était pas dans le bon état d’esprit avant la compétition ou un match.

La préparation mentale, c’est un vrai  entraînement. On doit se comporter avec cette préparation comme une préparation sportive classique.

Nos joueurs n’ont pas suffisamment confiance en eux ?

Ne pas avoir confiance en soi, c’est normal. L’idée c’est de travailler cela. Parfois je vois des joueurs se détruire à l’entraînement. Comment peuvent-ils ensuite arriver en match et être positifs.

Et cette notion de partenaires…

Je remarque  qu’après un match de padel, on parle souvent du partenaire. En bien ou en mal, mais son partenaire a toujours une incidence…

Parfois, on peut croire qu’on  aide son partenaire avec des mots alors que c’est tout le contraire. Par exemple, lorsque tu dis à ton partenaire : “Allez pas une faute maintenant”.  C’est bienveillant , pourtant ces quelques mots peuvent avoir un effet très négatif sur son partenaire.

Comment parler à son partenaire ? Comment recevoir les infos de son partenaire ? C’est tout un programme.

Franck Binisti

Franck Binisti découvre le padel au Club des Pyramides en 2009 en région parisienne. Depuis, le padel fait partie de sa vie. Vous le voyez souvent faire le tour de France en allant couvrir les grands événements de padel français.