Jérémy Scatena revient pour Padel Magazine sur l’incroyable aventure humaine qu’il a vécue grâce au padel jusqu’à sa retraite comme joueur professionnel. Une suite de rencontre qui l’ont fait grandir. Il espère pouvoir jouer un nouveau rôle à l’avenir pour développer le padel en France. Interview.

2023 : l’une des saisons les plus compliquées

Mon bilan 2023 : je considère que c’est l’une de mes moins bonnes années depuis 2017. Je la comparerais même à 2021, qui n’a pas été très bonne non plus. Pour la première fois, je n’avais pas de rêve ou d’objectif majeur qui m’animait.

Après avoir remporté la médaille de bronze avec l’équipe de France lors des derniers mondiaux, atteint la 67e place mondiale (FIP) et être entré dans le top 100 au ranking du World Padel Tour, devenant ainsi le premier Français à atteindre ce rang sur le circuit professionnel de référence de l’époque, je pense que j’ai atteint mon maximum.

Plus d’objectifs pour me motiver à m’entraîner

J’ai eu du mal à donner un sens à mes entraînements ces derniers temps, à mes matchs et à mes tournois. Je ne pouvais plus me réveiller le matin avec la même passion et détermination que par le passé. Je n’avais plus d’objectifs qui me motivaient à m’entraîner intensément, à repousser mes limites et à viser des classements plus élevés.

Pequery coaching

Les partenaires différents : à cause de mes mauvaises performances

J’ai joué avec différents partenaires en raison de mes performances en dents de scie. Je crois que c’est clair et ça ne sert à rien de se mentir à soi-même.

J’ai subi ces changements de partenaires parce que je n’étais pas suffisamment bon en 2023.

Heureusement, grâce à mes points accumulés, j’ai pu jouer avec des joueurs compétents lors des rares occasions où j’ai bien joué au cours de l’année. Et puis, en plus de mes prestations plutôt moyennes, il est vrai que je n’ai pas eu de bons tableaux.

Mais la bonne nouvelle : je suis assez fier d’avoir réussi à terminer cette saison avec quelques bons matchs comme à Madrid ou à Rome, et le FIP Rise aux Pays-Bas. Il y a eu quelques moments où j’aurais pu faire un peu mieux et embellir ma saison, mais quelques bons résultats sont venus atténuer une saison difficile.

Le point positif : j’ai réussi à bien gérer ma saison

Savoir gérer les périodes de moins bien, aujourd’hui c’est possible avec l’explosion du nombre de tournois internationaux sur tous les continents. Et évidemment, les niveaux d’un continent à un autre peuvent varier très sensiblement.

J’ai participé à des tournois de moindre envergure pour éviter un bilan mauvais comme en Égypte ou au Japon. Parce que oui, avec le boom des tournois de padel via le FIP Tour, il est dorénavant possible d’aller se faire des tournois en Europe de l’Est, en Asie, en Afrique, en Océanie, gagner des points importants pour ne pas être décroché dans le ranking lorsqu’on est dans une mauvaise passe. Et puis ça permet aussi de se relancer mentalement, de gagner quelques matchs, même si le niveau de ces compétitions n’a rien à voir avec les FIP espagnols, français ou italiens par exemple.

Mission top 100 mondial : accomplie !

Si pour l’instant, les joueurs semi-professionnels / professionnels ne se sont pas vraiment encore rendu compte des opportunités offertes par le FIP Tour avec un boom des tournois internationaux, je pense que ce que j’ai fait en 2023, d’autres joueurs le feront de plus en plus dès 2024.

J’ai géré ma carrière en 2023 pour me permettre d’atteindre le top 100 mondial. Et la mission est accomplie.

Ma meilleure année avec Tison en 2020

Cependant, ce qui est sûr, pour gagner des matchs, il faut être bon et avoir un bon partenaire. La recette est simple. Chaque fois que j’ai été performant au cours de ma carrière, j’ai été en mesure de gagner des matchs avec différents partenaires.

J’ai réalisé ma meilleure saison en 2020 en tandem avec Benjamin Tison. En fait, en début d’année, j’étais un peu meilleur que lui, mais à la fin de l’année, sa performance était supérieure à la mienne. Nous avons réussi à remporter des matchs importants avec notamment deux tournois où on passe cinq tours et on perd un match très serré face Antonio Luque et Jon Sanz.

C’est peut-être la saison où j’ai obtenu le plus de victoires marquantes de ma carrière.

Je ne serai plus un joueur professionnel en 2024

En ce qui concerne l’année 2024, mes projets sont encore un peu flous, mais je peux affirmer que je ne serai plus un joueur de padel professionnel. Je n’aurai plus à me lever tôt le matin pour m’entraîner intensivement comme je le fais depuis 2018.

Je continuerai à participer aux tournois majeurs en raison des points accumulés, mais mon focus principal sera sur ma vie professionnelle et ma philosophie de vie axée sur le bien-être physique.

100% Padel, ma vie, mon objectif

Depuis environ un an et demi, je suis impliqué dans la vente et la construction de terrains de padel via ma société, 100% Padel.

J’ai de grandes ambitions pour cette entreprise. Nous avons récemment embauché une personne clé qui était le co-fondateur de l’une des plus grandes entreprises dans ce domaine. Sa mission démarre le 2 janvier.

Nous visons à devenir le terrain officiel de tournois internationaux et à sponsoriser des joueurs français pour les aider dans leur carrière, tout en rendant au padel un peu de ce qu’il m’a apporté dans ma vie.

Beaucoup de choses sont en train de se mettre en place. Et promis, je reviendrai vers vous pour ce que nous mettons en place pour 2024.

Ce qui me motive le plus, c’est de réussir dans la vie tout en offrant des opportunités à mes proches et à ceux que j’aime. Si je peux contribuer à leur réussite et à leur épanouissement tout en gagnant ma vie, c’est pour moi un objectif important qui me donne une grande énergie.

Il y a un effet Scat sur Ben et Ben sur Scat

Avec Ben, il est indéniable qu’il y a eu une influence mutuelle. Cependant, je dirais que l’effet de Ben sur moi a été plus significatif. Au cours de l’année, Ben a connu des problèmes physiques, et ce n’est pas simple mentalement. Mais il a réussi à revenir en forme à la fin de la saison et il a réalisé au final un super finish avec un très bon niveau de jeu.

Pour ma part, j’avais déjà pris la décision de mettre fin à ma carrière de joueur professionnel de padel.

scatena tison milan

Si Ben avait dit oui, j’aurais dit oui

Cependant, si Ben avait choisi de continuer, j’aurais peut-être envisagé de m’entraîner à ses côtés pendant quelques mois, spécifiquement pour l’équipe de France, afin de faire une dernière danse ensemble. Nous avons réalisé des performances exceptionnelles avec l’équipe nationale, 4e en 2018, 4e en 2020 et cette 3e place incroyable lors des derniers mondiaux à Doha. Si Ben avait continué, je me serais battu pour qu’on s’offre avec l’équipe un dernier grand moment, une dernière danse avec l’équipe de France.

La fin d’un cycle et le début d’une nouvelle aventure

C’est certainement la fin d’un cycle avec Ben et moi.

Cependant, la vie suit son cours, et il est temps de laisser place à la nouvelle génération.

Mon départ n’aura pas un impact majeur sur l’équipe de France, bien que cela affaiblisse légèrement le côté gauche de l’équipe. Néanmoins, il existe d’autres joueurs tout aussi compétents, voire meilleurs, pour occuper ce poste. Je suis convaincu que notre équipe continuera à réussir grâce à l’esprit d’équipe que nous avons construit au fil des années.

C’est l’une de nos plus grandes fiertés, et cela nous lie profondément les uns aux autres.

Jérémy scatena

Jouer un rôle différent avec la team France

Et pour rien te cacher, si ma carrière de joueur s’arrête, j’ai l’envie de poursuivre d’une autre manière. J’espère que j’aurai cette opportunité d’avoir une mission au côté de l’équipe.

Je pense qu’avec Johan Bergeron, Bastien Blanqué, Robin Haziza, Adrien Maigret et Ben Tison, on a créé un truc en 2018, sans se le dire. Il y a eu un pacte tacite entre nous, car il y avait beaucoup de rivalités entre nous à l’époque.

Le Paraguay en 2018 a créé ce groupe France. Je pense qu’on a été, à ce moment-là, la meilleure équipe de France. On n’était absolument pas les meilleurs joueurs du monde, mais dans l’esprit, en termes d’équipe, nous étions les meilleurs. Et cette alchimie a perduré jusque-là.

Les victoires et ces nombreux matchs décisifs remportés ont forcément forgé cette équipe. C’est pourquoi nous sommes tous amis car il y a un lien très fort qui nous a uni pendant toutes ces années.

Franck Binisti

Franck Binisti découvre le padel au Club des Pyramides en 2009 en région parisienne. Depuis, le padel fait partie de sa vie. Vous le voyez souvent faire le tour de France en allant couvrir les grands événements de padel français.