Le padel devient le sport à la mode aux 4 coins du monde. Et nos voisins belges ne dérogent pas à la règle, bien au contraire.
Depuis 2 ans, la Belgique enchaîne les belles performances : une progression du nombre de pratiquants, toujours plus de clubs, la réalisation d’exhibitions du WPT à Bruxelles et Knokke, d’un tournoi APT à Lièges, de belles compétitions nationales dans les clubs… Mais aussi l’ambition d’organiser le “plus beau tournoi indoor” et ainsi démontrer au monde entier qu’elle sera une actrice majeur du padel ces prochaines années.
La padelmania est réelle en Belgique, mais elle doit faire face en Wallonie à une querelle entre 2 institutions : l’AFT Padel et l’AFP.
Un sport, deux organisations
Avant de rentrer dans le vif du sujet il convient tout de même de poser les bases et de présenter tous les acteurs du padel en Belgique pour bien comprendre la situation actuelle.
Petit retour dans le passé.
En 1992 la Fédération Belge de Padel (Padel Belgium) a été créée sous forme d’association par des joueurs et des passionnés dans le but de développer ce sport dans leur pays. En 2015, deux structures voient le jour au vu des deux régions qui divisent le territoire belge : les Flandres et la Wallonie.
Désormais c’est l’Association de Tennis (Tennis Vlaanderen) qui gère le padel dans les Flandres. Mais pour la partie francophone, la Wallonie, deux entités se partagent la gestion de la discipline : l’AFP (Association Francophone de Padel) et l’AFT – Padel (Association Francophone de Tennis).
En 2017 c’est sous la forme d’une convention que les deux parties sous l’égide du ministre des sports, accordent la reconnaissance à l’AFT – Padel dans cette gestion.
L’année 2021 a marqué chez nos voisins une période compliquée entre rupture de convention et conciliation. Et en octobre dernier ce fut la fin de cette collaboration.
Les raisons de cette scission
Vous l’aurez compris depuis des années le padel est représenté par deux entités liées par une convention.
Après plus de 3 ans de collaboration, les deux associations ne veulent plus travailler ensemble.
La raison ?
Il semblerait que ces structures soient en désaccord quant à des décisions prises depuis un certain temps.
Nous avons pu échanger avec chacune des deux structures afin de mieux comprendre cette situation.
Du côté de l’AFT – Padel les dirigeants reprochent à leurs “concurrents” “un non respect de la convention suite à des décisions prises sans aucune concertation, pour des sujets comme les outils de communication, les compétitions ou le sponsoring ” comme nous l’expliquait le directeur Pierre Delahaye.
A l’AFP, Laurent Jeuniaux, coordinateur sportif, voit cette séparation comme une surprise : “En juin 2021, l’AFP reçoit un courrier de l’AFT stipulant leur volonté d’arrêter la collaboration. Il n’y a pas vraiment de raison invoquée à part : « des dissensions, des manquements etc” Cependant nous ne savons toujours pas lesquels” s’interroge le membre de l’AFP.
Celui qui est l’un des piliers du padel belge depuis plus d’une décennie poursuit :
“Nous sommes certes une jeune fédération mais c’est aussi cette jeunesse qui nous permet de voir le padel pour ce qu’il est. Un sport dynamique, facile, amusant, rapide, social…”
“Nous avons l’expérience de sa gestion depuis 6 ans et nous sommes arrivés à une certaine maturité au niveau de nos règlements (tournois et interclubs). Nous avons un système informatique qui s’améliore au fur et à mesure de nos besoins. Nous avons également des rankings dynamiques et motivants, un circuit qui démarre en début d’année, un système de classement revu deux fois par an.
Nous avons aussi le soutien d’une majorité des clubs, 60% à l’heure actuelle, et il y a encore 20% de clubs indécis.”
Une guerre d’égos ?
En prenant du recul et avec un œil totalement extérieur nous pourrions nous poser la question si tout ceci ne serait pas tout simplement une guerre d’égos.
Qui sera la première association à prendre son indépendance et à gérer ce sport grandissant faisant fureur partout dans le monde ?
Pourquoi l’AFT-Padel serait-elle plus légitime que l’AFP ou l’inverse d’ailleurs ?
Nous avons posé la question à son directeur Pierre Delahaye.
“Il ne s’agit pas d’un problème de légitimité. Dès lors que le padel est géré par des personnes qui veulent son développement, le travail de ces personnes est légitime, mais sans vouloir minimiser le travail de quelques dirigeants de l’AFP, ils n’ont pas le monopole du padel.
En quoi l’AFP serait-elle plus légitime que l’AFT Padel ? Pour mémoire, quasi tous les joueurs de l’équipe nationale sont aussi des joueurs de tennis de haut niveau.
L’AFT Padel ne prend pas son indépendance :
- Elle prend du recul vis-à-vis d’une fédération (AFP) qui n’a pas su se montrer efficace en matière de développement (6.000 membres du côté francophone et plus de 60.000 du côté flamand) et qui n’a pas été fidèle par rapport aux accords initiaux.
- Elle préserve la possibilité d’une identité nationale, car Padel by Tennis Vlaanderen n’entend pas collaborer avec l’AFP compte tenu de ses prises de position tranchées au niveau international. Ces prises de position mettent en difficulté le padel belge vis-à-vis de la FIP.
- Elle est d’ailleurs confortée en cela par un récent arrêté ministériel qui confie officiellement la gestion du Padel au sein de la Fédération Wallonie Bruxelles à l’AFT Padel”
Des ambitions prometteuses
Puisque la scission semble inévitable, les 2 associations veulent mettre un programme en place pour développer le padel sur le territoire Wallon.
L’AFP a des objectifs bien précis. Elle nous a livré ces différents éléments :
- Promotion chez les jeunes
- Développement du padel féminin
- Convivialité et amusement
- Compétitions simples et rapides
- Guide pour la construction de terrains
- Évènements promotionnels innovants
- Association au monde de l’entreprise
- Développement du haut niveau
Du côté de l’AFT, 2022 sera elle aussi une année charnière car depuis le 1er décembre, l’association décline l’ensemble de ses projets en faveur du développement ambitieux du padel, qui sera géré en toute autonomie par des représentants élus des clubs de padel au sein d’un nouveau comité de gestion créé à cette intention au sein de l’AFT Padel.
Leur objectif majeur est bien entendu le développement des clubs ainsi que la détection et la formation des jeunes.
A cet effet l’AFT Padel a engagé pour les trois prochaines années un directeur sportif, Clément Geens, membre de l’équipe nationale.
Afin de garantir une formation optimale des cadres, elle a également engagé un responsable de la formation des futurs entraîneurs, Juan Pablo Abarca, par ailleurs capitaine de la sélection nationale Messieurs.
L’AFT Padel a l’intention de gérer la discipline en total accord avec Padel by Tennis Vlaanderen.
Cela signifie concrètement que :
- Une compétition nationale sera mise sur pied pour les meilleur.es joueuses et joueurs.
- Les calendriers interclubs des 2 ligues (FR/NL) seront alignés.
- Les sélections nationales seront décidées conjointement.
Vous l’aurez compris, un sport, deux structures en désaccord pour la gestion de cette discipline même si les ambitions paraissent plus ou moins les mêmes.
Joueurs et clubs mécontents “d’être pris en otage”
Dans notre enquête, nous avons été étonnés par les nombreux joueurs et clubs attristés par cette guerre entre les deux institutions francophones. Un mot revient souvent : “la prise d’otage”.
En effet, les clubs de padel en Wallonie sont sollicités par les institutions pour prendre position. Voici ce que l’on a pu entendre :
Pourquoi nous demande-t-on cela alors que nous étions satisfaits du travail effectué par l’AFP Padel / AFT Padel jusque-là. Il y a certes du travail à faire et on peut évidemment mieux faire. Mais ce n’est pas en se faisant la guerre qu’on va régler les problèmes.
Et surtout on a l’impression maintenant que l’on souhaite absolument opposer le tennis au padel. Par exemple, les clubs de tennis qui ont du padel doivent être forcément AFT Tennis et les clubs de padel AFP. ça n’a pas de sens. Et surtout, on oppose. Cette querelle ne fait du bien à personne.
Voici un recueil des propos tenus par d’autres joueurs et clubs belges :
Le padel est en plein boom. En Wallonie, le padel a clairement su profiter de ce développement. Pour quelle raison, ne pourrions-nous pas voir ces deux institutions travailler ensemble ?
L’AFP a un historique dans le padel qu’on ne peut balayer d’un revers de main.
L’AFT Tennis pourrait apporter ses compétences, son réseau.
Du point de vue des joueurs et des clubs, on trouve cela malheureux de les voir se chamailler alors que tous les voyants sont au vert pour poursuivre et accompagner le développement du padel en Belgique.
Les deux associations réussiront elles à trouver un accord et à travailler ensemble ? La réconciliation est-elle possible ?
Affaire à suivre.
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