Au micro des journalistes du magazine Marca, Pablo Lima aborde plusieurs sujets dont celui de rester le plus longtemps possible aux côtés de Paquito Navarro.
Pablo Lima, finaliste du WPT Estrella Damm 2020 de Madrid, partenaire de Paquito Navarro et numéro 4 mondial répond aux questions de nos collègues espagnols.
Comment as-tu vécu le confinement ?
Ça a été difficile. Au tout début c´était tout nouveau et j´étais plutôt content. Mais au fur et à mesure c´est devenu pesant. Cela m´a permis de réfléchir. J´ai appris grand nombre de choses : à être plus patient, à prendre soin des personnes qui m´entourent et à être plus communicatif avec ma femme. J´ai essayé d´améliorer des choses auxquelles je ne portais pas beaucoup d´attention auparavant.
Est-ce que tu suis l´état de la pandémie au Brésil ?
La situation est préoccupante car nous ne possédons pas les mêmes structures qu´en Europe. Le niveau économique est fragile et les aides ne sont pas les mêmes qu´ici. Dans les villages brésiliens, il y a beaucoup de différences sociales et ça me rend triste de voir un pays si riche en tant de choses et passer par autant de problèmes. Je suis inquiet pour mes amis et ma famille.
As-tu pu t´entrainer ?
J´en ai profité pour monter une petite salle de sport à la maison. Courir, des poids et du matériel pour ne pas perdre la préparation physique, ce qui était le plus important parce-que nous ne savions pas si nous allions reprendre à jouer la semaine suivante ou pas.
Quand as-tu pu entrer à nouveau sur une piste ?
Je ne me souviens pas exactement. Mais je vis dans un village de 5000 habitants, proche de Bilbao, et j´ai pu très rapidement reprendre le chemin des pistes, un avantage.
Tu as un bon contact avec Paquito Navarro ?
Depuis la reprise, il est venu passer une semaine à Bilbao et moi je suis venu ensuite une semaine à Madrid. Nous faisons l´effort de voyager pour pouvoir nous entrainer ensemble et aborder les prochains tournois dans les meilleures conditions.
Ce ne fût pas difficile de gagner le premier tournoi et ensuite de tout arrêter ?
Après avoir gagné un tournoi, l´enthousiasme est au plus haut. Et couper cet enthousiasme n´est pas agréable. Nous avons des projets et des objectifs, il faut continuer dans cette voie.
En parlant de projets. L´accord entre toi et Paquito expirera à la fin de la saison ou durera-t-il plus ?
Il faut réunir plusieurs conditions afin que nous continuions ensemble. Les résultats, l´entente et toutes les choses qui ne peuvent pas être prédites. Nous en avons déjà parlé, et si les choses vont bien, nous continuerons ensemble. Rien à voir avec le fait d´arriver au poste de numéro 1. Nous voulons devenir une paire forte, solide et surtout compétitive.
Lors de votre reprise à Marbella, et votre victoire, tu as permis à Paquito d´atteindre le poste de numéro 1. Tu es content pour lui ?
Bien sûr. Je fais partie de ces personnes qui pensent que si mon partenaire gagne 10 points, ce sont 10 points pour la paire et pas seulement pour lui. Je suis très content de former équipe avec un numéro 1.
Au tennis les paires ne changent quasiment jamais et encore moins lorsqu´elles gagnent. Au padel c´est l´inverse. Comment peux-tu l´expliquer ?
Je crois que les joueurs sont impatients et souvent ne comprennent pas la façon d´être de l´autre. Si ça ne se fait pas comme ils veulent, ils ne comprennent pas qu´il peut y avoir un mélange, un peu de chacun. C´est seulement un problème d´entente et de compréhension de la personnalité de chaque joueur. C´est vrai qu´il y a des paires qui ont eu de bons résultats, qui sont arrivées au sommet et qui se sont séparées. Certaines fois l´âge ne correspond pas et l´entente se fait plus difficile.
Tu as 33 ans. Quand on regarde Bela qui a 41 ans et reste encore très compétitif, est-ce que tu penses que ta carrière peut être aussi longue ?
Quand les années s´accumulent, il arrive un moment où il faut penser au futur. Quand tu as 25 ans, tu ne penses pas à ça. Mon idée est d´essayer de jouer jusqu´à mes 40 ans. Et si j´arrive à 40 ans et que j´estime avoir toujours le niveau, je continuerai un peu plus.
Une de tes idoles est Gustavo Kuerten. Tu penses que le tennis et le padel sont liés ?
Le tennis brésilien est un sport sans structures, et mon pays n´a pas une culture des sports de raquette. Qu´une personne comme Guga soit devenue numéro 1 veut dire que c´est un phénomène. Ce que j´aime chez lui c´est qu´il a toujours eu le même comportement. Un numéro 1 ce n´est pas l´être seulement quand tu gagnes. Par exemple Juan Martín Díaz a le même comportement. Il a été numéro 1, ne l´a plus été, mais reste le même. C´est ce que j´aime, leur attitude en dehors de la piste plus que celle sur la piste.
Tu as vu directement la croissance du padel. Ça te surprend que le padel ait grandi si rapidement ?
Le padel a évolué très rapidement. Peut-être la nouvelle génération ne s´est pas rendu compte du bon état dans lequel est le padel aujourd´hui. Quand je suis arrivé en Espagne en 2005, le padel n´avait rien à voir. C´est un ensemble, les joueurs, le WPT, les sponsors. Ils réalisent un très bon travail, et la prochaine étape est que le sport se développe plus fortement en Europe afin de retrouver plus de professionnels européens aux premiers postes.
Tu es arrivé en Espagne à 18 ans et avec 5€ en poche. Comment les choses ont changé ?
C´est gratifiant de voir que les choses qui étaient prévues pour ne pas fonctionner, au final, fonctionnent. Quand je suis venu jouer le dernier Master Final à Barcelone, le meilleur de l´histoire, je me suis dit : “joue et prends du plaisir car tout ceci est bien plus que ce que tu imaginais en venant ici.” Cet évènement a changé ma vision des choses. Ce que j´ai réalisé est déjà très bien, mais je vais essayer de prendre plus de plaisir en essayant de ne pas souffrir sur la piste car j´ai déjà gagné et eu bien plus que ce que j´avais imaginé.
Cette façon de penser t´a aidé à gagner le Master Final ?
Ça m´a aidé à voir les choses d´une façon différente et peut-être à ne pas être aussi tendu. Quand tu as des enfants et que tu vas avoir 34 ans, tu apprends des choses qui te font voir la vie et le sport d´une façon différente.
Quand tu joues devant 9 000 personnes au Palau San Jordi, ça donne la chair de poule ?
Dans mon cas, lorsque je rentre sur la piste, je ne me rends pas compte de ce qu´il se passe car je m´isole, J´ai cette chance. Mais lorsque j´ai vu les photos et des morceaux de matchs, je me suis rendu compte du niveau impressionnant qu´a atteint notre sport dans des lieux comme celui-là, et je suis super content de voir le padel dans cette position.
Une des grandes attractions du padel est le niveau équilibré que nous voyons aujourd´hui ?
C´est la preuve que notre sport est toujours plus professionnel. Plus de sponsors, plus d´argent… Plus il y aura d´argent dans le circuit, plus de joueurs nous aurons car ils pourront s´entrainer plus et dans de meilleures conditions. Il y a 10 ans, il y avait 5 ou 6 paires qui s´entrainaient, et les autres devaient réaliser une autre activité pour s´en sortir. C´était un grand désavantage. Aujourd´hui il y a de plus en plus de jeunes qui arrivent aux avants- postes, et certains d´entre eux sont espagnols. C´est ce qui fait aussi que le padel évolue car la majorité des tournois sont en Espagne.
Cette discipline pourrait-elle devenir populaire dans ton pays le Brésil ?
Nous avons une culture basée sur le football, et il n´y a aucun appuis pour d´autre sports qui ne soient pas du football ou un sport olympique. Le padel n´est pas olympique et la culture des sports de raquette n´est pas présente. Ce serait pour moi un souhait, mais je ne pense pas que cela arrive prochainement.
Le padel deviendra sport olympique ?
Les institutions luttent, mais ils devront travailler encore plusieurs années. J´espère qu´ils y arriveront, mais il en faut beaucoup pour convaincre ce géant.
Source : Marca
Julien Bondia est professeur de padel à Ténérife (Espagne). Chroniqueur et conseiller, il vous aide à mieux jouer par l’intermédiaire de ses tutoriels et articles tactiques/techniques padel.