Eric Largeron, le Vice-président en charge de la compétition et du padel, est revenu pour nous sur de très nombreux sujets d’actualité lors des Interclubs N1.
Le padel et la FFT : cela fait maintenant 10 ans
“Lorsque le Ministère des Sports a suggéré à la Fédération d’inclure le padel dans ses règlements, nous avons constaté qu’il existait déjà une organisation dédiée au padel. Cependant, de nombreux clubs proposaient également du tennis. Nous avons donc pensé qu’il serait judicieux de gérer les deux sports conjointement. Nous souhaitions éviter les erreurs commises par le football avec le futsal. Notre objectif était de contrôler le développement du padel et de superviser les constructions de manière à ce que les terrains de tennis ne soient pas simplement remplacés par des courts de padel, mais que nous puissions plutôt établir un réseau cohérent pour accompagner cette évolution. Après un début assez modeste, nous constatons ces dernières années une croissance exponentielle.”
La montée en puissance de la FFT autour du padel
“La réponse à l’évolution du padel en France est, à mon avis, à analyser en plusieurs phases. Initialement, lors de la constitution des équipes de France, période à laquelle je n’étais pas présent, la fédération a souhaité lancer des circuits et des tournois d’envergure pour permettre aux joueurs de se mesurer entre eux. Cela a créé une dynamique, suscité de l’intérêt, et nous avons accompagné ces athlètes désireux de participer au circuit World Padel Tour. Nous avons pris exemple sur l’Espagne.
Ensuite, pour répondre à une forte demande, nous nous sommes concentrés sur les compétitions interclubs, favorisant ainsi l’esprit d’équipe plutôt que l’individualisme. Ces deux dernières années, cette approche a répondu aux attentes. Je pense que la progression du padel en France doit beaucoup à nos meilleurs joueurs qui ont su élever le niveau du jeu et solidifier la base de pratiquants qui est aujourd’hui en plein essor.”
La 3e édition des Interclubs N1 du 2 au 4 février
“Pour la 3e édition des interclubs Nationale 1 qui se tiendra le premier week-end de février à Padel Horizon, nous avons décidé de modifier le calendrier. Le padel de haut niveau est souvent aligné sur l’année civile, mais en tant que fédération, nous suivons un calendrier sportif. Organiser un championnat de France mi-décembre n’est pas dans nos habitudes. Nous sommes également confrontés à des contraintes réglementaires et techniques, car nous n’avons pas toujours les outils informatiques adéquats. Nous avons donc dû procéder manuellement, ce qui s’est avéré complexe.
Néanmoins, en débutant par la Nationale 1, nous pourrons progressivement intégrer les autres championnats. La concurrence est rude, certains clubs visent le titre pour des raisons sportives et commerciales, car un titre de champion de France Interclubs est très convoité, comme l’a démontré la All In en décrochant les deux titres. Il y a ceux qui cherchent à se maintenir parmi l’élite et d’autres qui aspirent à y accéder. Au début, nous avons sélectionné les 16 meilleures équipes sur le papier, mais le jeu des promotions et des relégations rend la compétition sur les pistes très disputée, ce qui est pour nous très satisfaisant.”
Il y a des règles qui ne sont pas appliquées
“On a finalisé le guide de la compétition qu’il faudra d’ailleurs à l’avenir sortir plus tôt. On fait des ajustements, car après avoir mis des règles en place, on regarde comment se comporte le terrain. Certaines sont difficiles à appliquer, certaines ne sont carrément même pas respectées. Et toujours avec ce problème informatique, on ne peut pas forcément contrer ces choses-là.
On ne peut pas tout surveiller non plus aujourd’hui. Moi ce que je regrette, c’est qu’on fonctionne beaucoup par dénonciation, parce qu’il n’y a que comme ça finalement qu’on sait les choses et qu’on est obligé de réajuster. C’est dommage, mais on ne peut pas trop faire autrement.”
Aider le public et le privé
“Ce que nous prônons, c’est vraiment la qualité. Pour la qualité des installations, nous avons mis en place des dimensions, et pour les futures pistes, nous avons également prévu des aides financières beaucoup plus importantes que pour les premières qui se sont montées dans les clubs, même dans les clubs privés.
Donc, nous avons multiplié les budgets de l’équipement par deux. Ensuite, nous avons travaillé avec l’ANS, l’aide de l’État, mais qui est un peu différente et qui a des objectifs différents. Cela ne concerne que certaines régions, il faut remplir le cahier des charges, ce n’est pas pour tout le monde. Il faut savoir que l’esprit de l’ANS, c’est par exemple de construire des tables de ping-pong en ciment dans les parcs à loisirs, permettre l’accès du sport à toute la population, etc. C’est un peu cet esprit-là. Mais on ne peut pas se promener dans un parc, dire, “tiens, hop, il y a des vitres, c’est bon, je vais pouvoir jouer.” Le padel, c’est autre chose.
Alors, nous avons eu la chance quand même d’avoir pour certains des financements qui ont permis des constructions, mais voilà, maintenant nous allons continuer le développement fédéral aussi bien privé que municipal et faire en sorte qu’il y ait une progression uniforme et harmonieuse pour tout le monde.
Aujourd’hui, il y a un équilibre qui s’est fait, qui s’est construit entre les clubs municipaux et les clubs privés. Il ne faut pas se leurrer, les clubs privés qui ont besoin d’être soutenus se sont montés en association. Ça permet aussi de réguler la TVA notamment, c’est tout à fait logique. Et cette association leur permet d’avoir une affiliation classique comme un club municipal et d’être aidé de la même manière. On aide financièrement sur de l’existant. L’existant peut être un club de tennis, par exemple, un club de tennis qui veut ajouter deux pistes : il a fait ses preuves au niveau du tennis, il veut se développer avec le padel, on va l’aider. Une structure privée, mais qui s’est montée en association, a déjà quatre pistes qui tournent bien, qui sont souvent pleines, là aussi, on va aider pour les deux pistes supplémentaires, peut-être même pour la couverture, en fonction de ce que demande effectivement la structure. Mais tous les privés qui essaient d’investir dans des endroits stratégiques pour appliquer leur business plan et essayer de vivre du padel, au départ, nous les laissons faire.”
L’indexation
“Il faut savoir qu’un club de tennis, tel que nous le connaissons en tant que dirigeants, fonctionne par une cotisation annuelle. Et dans cette cotisation annuelle, il y a le prix de la licence : la personne est licenciée, c’est terminé. Au padel, c’est différent. Il y a des cotisations annuelles pour certains, oui, mais il faut reconnaître que la majorité des choses, c’est le ticket. Donc soit le ticket unitaire, soit le ticket de 10, pour lequel il n’est pas toujours facile de dire à une personne : “Prends une licence à la Fédération parce que tu es venue 5 ou 6 fois, etc.”
Donc nous le faisons dans le cadre des tournois. Nous sommes très satisfaits de ce développement. Nous ne voulons pas trop y toucher, nous modifions certaines règles, je vais y revenir, mais c’est quelque chose qui fonctionne bien, qui est très apprécié, quand on voit l’engouement des personnes qui veulent gagner 10 points de plus sur un match parce que cela peut leur faire gagner une place. Ça, nous allons essayer de ne pas y toucher. Mais comme il est difficile pour les structures de délivrer des licences dans la tradition et selon la définition de la FFT, eh bien, nous avons pris le problème à l’envers en disant : “Vous voulez organiser beaucoup de tournois, c’est quelque chose qui anime votre structure, mais en contrepartie, il faut que par rapport à toutes les réservations que vous faites, il faut que ceux qui viennent régulièrement appartiennent à la Fédération.” Beaucoup jouent le jeu, nous avons mis l’indexation en place uniquement pour les quelques structures qui avaient tendance à organiser beaucoup de tournois, mais à ne licencier personne. C’est surtout à eux que nous avons pensé.”
Les P500
“Sur les P500, ce n’est pas l’abandon du prize money, c’est le prize money non obligatoire. C’est quand même différent, car justement les structures étaient en faveur d’une petite récompense, je les encourage à continuer à le faire, peut-être pas à hauteur de 500 €, je le reconnais, mais voilà, il ne faut pas que ce sport se résume uniquement à la quête de points, car il y a aussi un événement et les deux meilleurs à la fin méritent peut-être un peu plus que les 250, les 500 ou les 1000 points. Et je rappelle qu’un P500, contrairement au P250 et P100, comportera un cut. Du moins, au niveau de l’Occitanie, qui est un important organisateur de P500 en France, je vais mettre en place un système pour que le cut soit transparent, bien défini, et qu’il n’y ait pas de remplacements douteux. C’est un point auquel nous tenons, car ce n’est pas parce que nous assouplissons les règles que nous sommes prêts à tout accepter.”
“Aujourd’hui, nos P1000 ne sont plus les mêmes qu’auparavant. Nous avions de nombreuses paires qui parcouraient toute la France pour jouer un P1000. C’est terminé. Aujourd’hui, nous avons peut-être trois ou quatre paires très fortes, les autres sont des joueurs locaux. C’est pourquoi nous avons créé les P1500, même si un classement n’est pas forcément un indicateur absolu du niveau d’un joueur, il faut quand même essayer de s’en approcher, car le classement reste la base.”
Les jeunes au Paraguay
“Les jeunes ont été enchantés des conditions idylliques dans lesquelles ils étaient : c’est le bout du monde, c’est une aventure, c’est le maillot de l’équipe de France, c’est fabuleux. Cependant, en tant que représentant de la fédération, je suis obligé de reconnaître que nous ne pouvons pas nous contenter des résultats que nous avons obtenus, bien que mérités. Les garçons ont fait de leur mieux. Nous avons probablement gagné le match décisif qui nous a permis d’atteindre la cinquième place.
J’étais un peu plus déçu du côté des filles, mais cela reflète aussi la situation en France. Les écoles de padel ne décollent pas encore. Donc, pour former une élite, même une élite jeune, il faut d’abord une base solide, et nous ne l’avons pas encore. Donc, la sixième place chez les filles m’a un peu déçu, même si je mets en avant la médaille de bronze de Kimi et de Lou en U16, elles qui d’ailleurs n’ont pas perdu un seul match d’équipe. Donc, j’attends mieux, mais c’est aussi de notre faute. Les jeunes ont fait de leur mieux, personne n’a abandonné, les capitaines ont fait leur travail, mais pour un pays comme la France qui organise le Major à Roland-Garros, qui a été la véritable impulsion du padel français, nous ne pouvons pas nous contenter de la cinquième et de la sixième place, même s’il y a d’autres pays qui s’organisent, etc.”
La FIP et Premier Padel
“Clairement, il y aura un avant et un après Roland-Garros, et le Premier Padel P2 qui aura lieu à Bordeaux l’année prochaine. On perd Toulouse, mais on gagne Bordeaux. Premier Padel n’a pas voulu plus de tournois en France, et moi, je laisse faire leur maillage, bien sûr. C’est vrai que l’apparition de Roland Garros, l’émergence de Premier Padel a totalement bousculé les cartes, et dans ces cartes-là, je trouve que nous avons quelques cartes maîtresses qu’il faudra jouer aussi au bon moment.”
“Concernant la FIP, on a d’excellentes relations avec eux. Par contre, force est de reconnaître qu’au niveau de l’organisation et au niveau de la communication, je pense qu’il y a encore des progrès à faire de leur part.“
La formation et la FIP
“Et pour te donner un autre exemple, je suis même déçu que lors d’une école d’arbitres et de juges-arbitres qui a été ouverte pour diplômer en conséquence les meilleurs, on a oublié de prévenir la France, alors qu’on a en particulier une personne que pas mal d’amateurs de padel connaissent, qui arbitre des finales de Major… L’école a été faite mi-octobre, nous l’avons appris après. La FIP a reconnu son erreur. J’ai donné pour consigne de faire un rappel cette semaine parce que bon, effectivement, avec tous les efforts qui sont faits par nos représentants, on ne peut pas se permettre de rester comme ça.
Traiter le tennis et le padel de la même manière
“C’est ça qui fait notre duplicité par rapport au tennis, même si le padel naturellement n’est qu’émergeant vis-à-vis du sport ancestral qu’est le tennis, on estime que nos équipes de France elles doivent être traitées de la même manière. Une équipe de Coupe Davis, elle ne va pas payer son voyage pour aller à Taïwan au mois de février. Nos équipes padel de jeunes, elles doivent être traitées dans les mêmes conditions que nos équipes tennis. Je veillerai personnellement à ce que ce soit toujours comme ça.”
“Les ressources de Roland-Garros tennis, qui sont très très grandes de par le gros travail de nos salariés et de certains élus de la Fédération, font qu’on a les moyens de pouvoir financer un Major, de pouvoir financer tout ce qu’on fait sur le padel. Peut-être que dans un avenir proche, il n’y aura plus besoin que ce soit le cas. Il faut savoir que nous avons réorganisé le padel au niveau de la Fédération, c’est redevenu une vraie direction, prise en charge par Stéphanie Cohen-Aloro, qui est une ancienne première série de tennis, mais comme Arnaud Di Pasquale, elle est tombée aussi dans le padel. Pas forcément jeune, mais elle s’est mise à fond dedans, et de par ses qualités d’organisation, de management, de développement, on sait qu’elle va rendre une très bonne copie sur cette direction, et donc je lui laisserai le soin de revenir sur ce point spécifique, elle qui est directrice du padel à la Fédération depuis le début du mois (décembre 2023).”
Franck Binisti découvre le padel au Club des Pyramides en 2009 en région parisienne. Depuis, le padel fait partie de sa vie. Vous le voyez souvent faire le tour de France en allant couvrir les grands événements de padel français.