Alors que le padel continue sa croissance rapide en France, la question du classement FFT revient de plus en plus souvent au cœur des discussions. Le système actuel, basé sur le volume et sur les meilleurs résultats, séduit par sa simplicité… mais interroge une partie des compétiteurs.
Certains jouent énormément sans grimper autant qu’ils l’espéraient ; d’autres progressent vite malgré peu de tournois. Ce débat, très présent en 2024, ravive un vieux sujet : faut-il intégrer une dose de “méritocratie”, comme autrefois dans le tennis ?

Quand le tennis dictait la logique du classement : perf, contre et évaluations périodiques

Pendant plus de trente ans, de début des années 1980 jusqu’en 2020, la FFT a utilisé au tennis un système extrêmement structuré :

  • les performances (“perfs”) faisaient monter,
  • les contre-performances (“contres”) faisaient descendre,
  • les classements étaient réévalués d’abord deux fois par an, puis une fois par an,
  • chaque match avait une importance presque stratégique.

Ce modèle a marqué des millions de licenciés. Il récompensait le mérite pur, mais il avait aussi des faiblesses :

  • beaucoup de complexité ;
  • nécessité de comprendre des grilles ;
  • stress permanent lié au risque de perdre des points ;
  • comportements d’évitement de certains tournois.

En 2021, la FFT y met fin pour un système simple, continu et plus lisible.
Autrement dit : pour le tennis lui-même, l’époque “perf/contre” a été refermée.

Un modèle volontairement différent pour le padel

Lorsque la FFT installe le classement padel, elle ne reproduit pas l’ancien modèle tennis. Pour deux raisons :

  1. Le padel est un sport à deux
    Le niveau dépend à la fois du joueur et du partenaire. Sanctionner une contre-performance devient beaucoup plus complexe à interpréter.
  2. La participation doit être encouragée
    Le padel, en pleine expansion, a besoin d’un classement rassurant, basé sur l’envie de jouer et non sur la peur de perdre des points.

Le système FFT padel est donc construit autour :

  • de la prise en compte du volume,
  • des meilleurs résultats sur une période donnée,
  • et d’une stabilité qui évite les chutes brutales.

Mais faut-il réintroduire la notion de “mérite” ?

En 2024, les discussions se multiplient autour de cas concrets. Certains joueurs enchaînent plus de 120 ou 150 tournois dans l’année, parfois sans atteindre des niveaux de classement attendus.
Ce phénomène relance la question :
« Ne devrait-on pas récompenser davantage les performances significatives, et sanctionner légèrement les contre-performances ? »

Les partisans d’une dose de mérite avancent :

  • une valorisation plus fine du niveau réel ;
  • la limitation des classements “gonflés” uniquement par le volume ;
  • une forme d’équité sportive proche de ce qui existait au tennis.

Les défenseurs du système actuel rappellent :

  • sa lisibilité ;
  • son rôle dans la démocratisation du padel ;
  • le fait qu’un joueur “surcoté” finit naturellement pénalisé :
    plus difficile pour lui de trouver un partenaire de son niveau officiel, ce qui freine ensuite sa progression.

L’idée d’une dose d’ELO : un débat qui monte en 2024

En 2024, Padel Magazine analyse déjà l’hypothèse d’intégrer partiellement un système ELO dans le classement padel.

Le système ELO, c’est quoi ?

Créé dans les années 1960 par Arpad Elo, c’est un modèle dynamique où :

  • battre un adversaire mieux noté fait progresser plus vite,
  • perdre contre un adversaire moins fort fait reculer,
  • chaque match ajuste le niveau réel.

Quels sports utilisent l’ELO ?

  • Échecs (modèle historique),
  • Tennis de table (dans plusieurs fédérations nationales),
  • Badminton (dans certaines ligues),
  • Esport (LoL, Rocket League, Valorant),
  • Sports de combat (modèles hybrides),
  • modèles inspirés de l’ELO utilisés en volleyball international.

Ce système est réputé pour refléter fidèlement la valeur sportive.
Mais pas forcément pour être simple.

Pourquoi l’ELO divise au padel ?

  • Le padel se joue à deux, ce qui complexifie l’attribution des points.
  • La FFT devrait gérer des milliers de matches par semaine avec des calculs dynamiques.
  • La peur de perdre des points pourrait freiner la participation — ce que la FFT veut absolument éviter.

Le padel, un sport où le classement influe sur les partenaires

Un élément rarement évoqué en 2024, mais essentiel :
un joueur “artificiellement bien classé” est rapidement rattrapé par la réalité, car il attire moins de partenaires au même rang.
Cela crée un mécanisme naturel de régulation :

  • moins de partenaires,
  • donc moins de bons résultats,
  • donc une stabilisation du classement.

Ce phénomène atténue déjà une partie des excès observés.

La piste d’un système mixte : ELO + volume

Certains imaginent un compromis :

  • conserver le volume et les meilleurs résultats,
  • mais ajouter une légère pondération ELO sur les perfs/contres significatives.

Avantages :

  • meilleure représentativité du niveau,
  • régulation naturelle des classements “gonflés”,
  • prise de risque valorisée.

Inconvénients :

  • complexité accrue,
  • nécessité d’un outil informatique robuste,
  • pédagogie importante à mettre en place.

Rien n’indique en 2024 que la FFT souhaite s’engager dans cette voie.

Conclusion : un système perfectible, mais qui a permis d’accélérer le développement

En 2024, une évidence demeure :
aucun système n’est parfait.

Le modèle FFT actuel :

  • est simple,
  • encourage le jeu,
  • accompagne la croissance du padel en France.

Le modèle tennis “perf/contre” a fonctionné, mais a aussi montré ses limites… au point que la FFT l’a abandonné.

Quant à l’ELO, il fascine par son exactitude, mais il divise par sa complexité.

La question n’est donc pas uniquement “quel système est le plus juste ?”, mais plutôt :
quel système est le plus adapté au padel français en pleine expansion ?

Pour l’instant, la réponse semble claire :
le système actuel remplit sa mission.

Franck Binisti

Franck Binisti découvre le padel au Club des Pyramides en 2009 en région parisienne. Depuis, le padel fait partie de sa vie. Vous le voyez souvent faire le tour de France en allant couvrir les grands événements de padel français.